Dans cette devise Simeoni se dépeint de nouveau et décrit les rapports qui le lient à Du Choul, montrant ainsi la place capitale du bailly dans le manuscrit :
Ou bien ou mal que i’aye interpretè, ordonnè, & representè ces devises, si veulx ie encores en representer cy un’autre toute mienne selon ma fantasie, & de tous les gentilz esprits, qui ont envie & le scavoir pour faire quelque acte digne d’eternele memoire, mais le plus souvent la fortune contraire à leurs magnanimes desseings & nobles entreprinses, co[m]me iadis eut l’hardi Phaeton, lequel voulant illustrer son nom moiennant la charge de son pere Phebus, entreprint de gouverner son chariot, dont il tumbà du ciel à terre, & neanmoins monstrà d’estre content de mourir tant honorablement avec ces paroles en la bouche MAGNIS TAMEN EXCIDIT AVSIS, ce q[ue] encores fut trouvè bon par Virgile ou il dist ET PVLCHRV[M] MORI SVCCVRIT IN ARMIS : & Petrarca de mesme disant Un bel morir tutta la vita honora. (ms Ashburnham 1376, f. 70v)
Le début du propos de Simeoni indique une conclusion. « Illustrer son nom moiennant la charge de son pere » rappelle l’ingrat travail de traduction auquel s’était attelé Simeoni durant les précédents mois. D’ailleurs, le terme « hardy » est employé par Simeoni pour s’autocongratuler d’avoir mené la traduction des Epistres Françoises, pris de furor (Epitome de l’origine et succession de la duché de Ferrare…, 1553, Paris, Corrozet, f. 44–45).
La référence à Phaéton et son père Phébus trouve un écho dans la relation qui liait Simeoni et Du Choul. En effet, le passage d’Ovide a pour thème la reconnaissance du fils par le père et cette référence est aussi très laudative pour Du Choul. La citation du mythe ovidien indique surtout le désir profond qu’a Simeoni de reprendre le flambeau de l’antiquaire lyonnais.
Ce feuillet est intéressant aussi parce qu’il porte trace d’une annotation de la main du libraire, Guillaume Roville. Sa remarque concerne l’invention même de la devise de l’homme « hardy & hazardeux ». Roville a écrit « pour ycel ou bien mettre un capitaine qui combat ou un consul qui demeure a la bataille ou autre co[m]me monstr[ant] dangier en la forme de lad[ite] canzone ». C’est à Simeoni que s’adresse cette invitation à reprendre son dessin, pour lui substituer une image qui soit conforme à la canzone de Pétrarque dont Roville assure une nouvelle édition durant l’année 1558. Simeoni a cherché le modèle du corps de sa devise auprès d’une autorité citée par Giovio : Giovanni Bernardi da Castel Bolognese. En effet, la Chute de Phaéton de la devise de Simeoni est fidèlement copiée, pour l’anatomie et la posture, sur une grande intaille sur cristal de roche gravé, composée vers 1533, à Rome, par Giovanni Bernardi d’après un dessin de Michel-Ange, aujourd’hui conservée au Musée National de la Renaissance, à Écouen.